D’après les données inquiétantes de l’ONF, nos forêts sont en train de péricliter. En effet, en seulement six ans, plus de 300 000 hectares de forêts publiques ont connu une mort prématurée, soit l’équivalent de 30 fois la taille de la ville de Paris.
Les défis des forêts françaises face au changement climatique
La forêt domaniale du Corgebin, située en périphérie de la ville de Chaumont (Haute-Marne), est un exemple frappant des effets du changement climatique sur les forêts françaises. Sur une superficie de 1101 hectares, on y trouve une variété d’essences telles que des hêtres, des chênes, des charmes ou des épicéas. Cependant, ces arbres sont de moins en moins nombreux, comme l’explique Jean-Claude Tissaux, chargé de mission « reconstitution et adaptation au changement climatique » à l’ONF : « Jusqu’en 2017 ou 2018, c’était une forêt relativement dense. En plein été c’était sombre, avec beaucoup de feuilles sur les arbres. Là, ça s’est considérablement éclairci. »
Une forêt en détresse
Les conséquences du changement climatique sont visibles avec des branches et des arbres au sol, tandis que d’autres arbres encore debout sont marqués d’un point orange, signifiant qu’ils seront abattus avant de mourir. En Haute-Marne, 40% de la forêt est confrontée à un dépérissement précoce. Jean-Claude Tissaux raconte : « Lors de la tempête de 1999, on a vu les bois par terre et ça a été un choc parce que du jour au lendemain le paysage a changé. On est maintenant dans une espèce de tempête silencieuse : il commence à y avoir des trouées, des éclaircies naturelles qui se font par la mortalité naturelle, la chute des arbres. »
« C’est l’équivalent en volume de ce que la tempête de 1999 a fait. Je ne sais pas jusqu’où on va aller… »
Jean-Claude Tissaux, ONFà franceinfo
Les conditions climatiques extrêmes, avec sept années de sécheresse et de chaleur exceptionnelles, ont affaibli les arbres. Lorsque l’eau se fait rare dans le sol, les arbres ferment leurs stomates pour éviter les pertes d’eau, ce qui les affame progressivement jusqu’à leur mort. Les arbres affaiblis sont devenus des proies faciles pour les scolytes, des insectes ravageurs, qui déciment les épicéas de la forêt. D’autres essences sont également touchées, incapable de développer leurs branches. Les éclaircies ainsi créées laissent passer la chaleur, aggravant la sécheresse et les risques d’incendie. Ce cercle vicieux est observé dans toute la France, en particulier dans l’est du pays.
« Dans un scénario pessimiste, le hêtre disparaît totalement »
Face à cette situation alarmante, l’ONF cherche des solutions à long terme. Des coupes sélectives sont réalisées pour limiter la concurrence entre les arbres et favoriser leur croissance. De nouvelles essences sont également plantées pour diversifier la forêt et s’adapter aux conditions climatiques changeantes. Des essences comme le cyprès de l’Arizona sont testées, montrant une certaine résilience face aux étés chauds et secs. Ces expérimentations visent à évaluer si ces nouvelles essences pourraient être envisagées pour le reboisement à long terme.
« Le but est de voir, à 10 ans, à 15 ans, à 20 ans, à 30 ans ou 40 ans, si l’espèce est envisageable pour le reboisement ou pas. »
Jean-Claude Tissaux, ONFà franceinfo
Cependant, ces efforts restent incertains face à la complexité des facteurs contribuant au dépérissement des forêts françaises. Le scénario pessimiste d’une disparition totale du hêtre d’ici 2070, dans un contexte de réchauffement climatique de quatre degrés, soulève des enjeux économiques, écologiques et climatiques majeurs. La disparition des forêts amplifie les phénomènes de sécheresse, perturbant le cycle de l’eau et impactant l’environnement de manière significative.