Huit décennies après les événements tragiques, un groupe s’est lancé dans une quête pour entendre les témoignages des rares survivants des massacres de Juifs en Europe de l’Est. Le récit de leur voyage est désormais immortalisé dans un roman graphique, mettant en avant ce génocide qui a trop longtemps été ignoré.
Un projet de longue haleine
Pierre-Roland Saint-Dizier, un journaliste et scénariste de bande dessinée, a travaillé pendant une quinzaine d’années à la Ville d’Albi. Récemment, il a été invité à accompagner un groupe d’étudiants de l’université Champollion d’Albi dans une enquête sur les fusillades de masse de Juifs perpétrées par les nazis en Europe de l’Est. Cette initiative a été réalisée en partenariat avec l’association Yahad-In Unum, qui depuis deux décennies interroge les derniers témoins de la Shoah par balles, un génocide largement méconnu par le grand public.
Un travail de terrain intense
Ce voyage a été l’occasion de rencontres poignantes et de témoignages forts, qui ont abouti à la création d’un roman graphique intitulé « Je n’ai pas oublié – Histoires de la Shoah par balles », publié aux éditions du Rocher. Pierre-Roland Saint-Dizier a confié lors d’une interview à France 3 Occitanie que ce projet a nécessité trois ans de travail. Il a suivi les étudiants et leurs professeurs sur le terrain pendant deux années consécutives, en mars 2022 et en mars 2023, à la rencontre des témoins et des spécialistes de ce sujet sensible.
L’auteur explique que la bande dessinée est construite sur deux temporalités distinctes : d’une part, le récit du voyage des étudiants, des professeurs et du journaliste à la découverte des lieux des massacres et des témoins, et d’autre part, des flash-backs illustrant les récits des survivants qui ont vécu ces événements traumatisants lorsqu’ils étaient enfants.
Christophe Girard, le dessinateur de la BD, est connu pour ses œuvres telles que « Ismahane », « L’Affaire Zola », « MBS, l’enfant terrible d’Arabie Saoudite » ou encore « Le Matin de Sarajevo ». Son travail met en lumière l’histoire méconnue des massacres de masse de Juifs, moins documentés que les horreurs des camps d’extermination nazis.
Des témoignages rares et précieux
Ygal Fijalkow, professeur de sociologie à l’université Champollion d’Albi, souligne l’importance de donner la parole à ces témoins qui, pour la plupart, s’expriment pour la première fois sur ces événements tragiques. Il explique que la particularité de la Shoah par balles réside dans le fait que ces exécutions se déroulaient en public, sous les yeux de la population locale, qui était souvent réduite au silence par la peur ou la complicité. Ce silence entourant ces massacres crée une différence fondamentale avec ce que l’on connaît des camps d’extermination en France.
Le roman graphique « Je n’ai pas oublié… – Histoires de la Shoah par balles » est un témoignage poignant de ce travail de mémoire et de transmission. Il permet de rendre hommage aux victimes de ces atrocités et de sensibiliser le public à cette page sombre de l’histoire de l’humanité.